Ascensions de l'Arrouyette et de la Mine

Publié le par Philippe Thévenet

L’ARROUYETTE ET LA MINE
27 octobre et 10 novembre 2007
 

Les épisodes montagnes se poursuivent en cet automne ensoleillé et plein de couleurs. Deux ascensions originales et désertes forment un « clin d’œil » à la toponymie. Le premier, à l’instar du Soum des Salettes, possède 2 patronymes, Pic d’Estos ou Pic d’Arrouyette. Le second, en revanche, partage son nom avec au moins un pic andorran, classique des débuts de saison en ski de rando, le Pic de la Mine. 

Vendredi 26 au soir, nous partons avec Maxence en camping-car. Il en profitera pour passer quelques jours sur les bords féeriques du lac de Loudenvielle. La nuit se déroule au frais sur le petit parking au dessus du col d’Azet. Départ vers 7 heures sous les remontées de Val Louron. La météo devait être radieuse, nous démarrons sous de denses nébulosités. Vite, s’extraire de ces pylônes, taches incongrues en cette saison, s’obstinant à dénaturer cette ambiance sauvage. 

Le sentier descend bientôt vers un vallon et la montagne reprend ses droits. Il fait frisquet d’autant plus que nous sommes en bon versant nord. Nous ne chômons pas et nous découvrons les lacs de Sarrouyès, particulièrement gelés. Nous avons l’impression d’être dans un mini cirque de Gavarnie, auréolé de cascades de glaces alambiquées. Le sentier se raidit jusqu’à une cabane de berger en tôle. Non seulement le soleil ne perce pas, mais des flocons, d’abord fins et clairsemés, puis de plus en plus gros, blanchissent nos bonnets. Dommage, la cabane est privée et fermée. Nous faisons une halte au bord d’un des petits lacs des Miares. Le café chaud de Dany me manque un peu. Trouver dans le brouillard qui s’épaissit cette arrête Ouest n’est pas simple. Nous suivons quelques anciennes traces intermittentes dans la neige, découvrant ici un autre lac, là un pierrier essaimé de très rares cairns. 

Soudain, presque par magie, le bleu nous envahit. Les nuages se déchirent très vite, nous laissant éblouis par ce soleil tant espéré. Juste à temps pour découvrir, proche de nous, le début de l’arrête finale. Le paysage est d’autant plus  impressionnant qu’il semble nous sauter aux yeux d’un coup. Mais l’ascension se complique avec cette montée en arrête couverte de neige. Succession de petites brèches, de fil un peu aérien. Nous progressons encordés, en assurant les passages rendus d’autant plus délicats qu’ils en sont parés de blanc. La récompense est au bout en son panorama original, notamment sur la chaîne du Lustou, la vallée de Loudenvielle. Nous savourons avec Max, tout à la fois notre repas animé et notre ascension victorieuse, grâce à l’arrivée opportune du soleil. 

Descente précautionneuse, comme il se doit. Et dès que nous libérons de la corde, chacun suit sa route. Phil sur les traces d’un isard, Max dans un vallon. Nous nous retrouvons toutefois au bord du dernier lac. Le retour est agréable, nous prenons notre temps, flânons presque, profitons d’une dernière halte pour suivre les envolées et les ballets des parapentistes colorés. Qu’il est agréable de ne pas reprendre la route. Nous dormons sur place sous les scintillements bienveillants du ciel pyrénéen étoilé. Quelques virées dans le secteur suivent en cette période de vacance. Profiter un max de ce soleil vivifiant. Tracer dans la poudreuse jusqu’au lac de Caillaouas avec Dany, Max, Elise et son père Marc. Des randos à la limite de la neige avec Dany : Cabane d’Outiga, Germ, Tour de Mourdoc… 

Samedi 10 novembre, l’appel des sommets nous rappelle avec Vivien. Cette fois, le schéma est plus classique, réveil matinal, aller et retour dans la journée. A 8 heures, seuls les chasseurs sont présents à l’Hospice de France. Regroupement de 4X4 et d’uniformes, annonçant sur un vaste panneau, la chasse en cours. Montée classique, connue. Très vite, le sentier devient blanc. La neige est gelée et glissante, il nous faut sinuer entre les secteurs herbeux et les plaques de glace. Franchir les torrents glacés en évitant des dérapages intempestifs. Versant nord encore, le froid est présent, même le refuge de Besnaque est à l’ombre. Les petits lacs sont gelés, au retour nous regardons même une bande de jeunes y improviser des glissades enfantines. La glace a l’air solide !

Halte au refuge pour saucissonner, nous hésitons entre la Mine et le Sauvegarde. Un randonneur arrive, sportif, 2 piolets sur le sac. Nous le retrouvons plus haut, il fait le Pic de la Mine. Encouragés par son exemple et par le couloir bien enneigé, nous lui emboîtons le pas. Piolets, crampons, un couloir raide est un véritable plaisir. Finalement, les crampons se révèlent superflus, la neige est molle et le haut s’avère vite dénudé. Il faut mettre les mains, sinuer entre les zones herbeuses et les rochers, en évitant les plaques de neiges trop dures. Monter avec précaution, car la pente est là et le sol glissant. La petite brèche est atteinte, avec en prime, ce panorama unique sur le massif de l’Anéto. La progression se poursuit sur l’arrête en une escalade soutenue, de petits passages sympas, avec un soupçon de gaz. 

Un dernier effort, et la cime est à nous. Le collègue nous attend admirant la Maladeta, quelle luminosité ! Calés un peu en contrebas, nous sommes à l’abri du vent. Ce montagnard est un passionné, plus de 30 ans d’ascensions. Nous échangeons nos souvenirs, en un moment très sympa : Roumazet, Arouyette, Lustou, couloir de l’Arbizon, Mancha…. Nous nous reverrons c’est sûr ! Quelle vision paradisiaque, même si les changements climatiques semblent nous rattraper, nous profitons des vestiges des glaciers, celui des Posets s’amenuise et la Maladeta  perd de sa superbe. Le temps de l’au revoir, notre montagnard poursuit la crête vers la Picade, un peu raide pour nous, cet itinéraire. Nous profitons encore un temps de cette vue unique et dire que la veille, je misèrais dans le métro parisien. Début de la descente, acclimatés, elle semble plus facile qu’à l’aller. Mêmes les passages un peu aériens sont enlevés allégrement. 

A la brèche, un isard nous attend comme pour nous montrer la route. A peine à 20 mètres, il déambule, serein et tranquille, nous laissant tout le loisir de le photographier. Puis, alerte, il franchit en quelques bonds une montée qui nous a nécessité de longues minutes. Le couloir descendant sur le versant espagnol est engageant. Facile, avec une langue neigeuse ramollie. Une descente sous l’emprise du Nétou. Traversée à flanc pour rejoindre le Port de Venasque. Déjà la féerie se voile, comme une fin d’aventure. La descente s’opère avec soins, ne pas glisser sur la glace. Les crampons auraient pu être utiles finalement. A vouloir couper dans la poudreuse, nous avons failli sauter une barre. Heureusement, nous avons anticipé à temps, même si rejoindre le sentier nécessita des efforts intenses pour traverser un torrent gelé.  La fatigue se fait sentir peu à peu. L’Hospice de France est atteint vers 17 h 30, alors que la nuit commence à nous envahir. Mais quel plaisir que cette journée. Quelques photos et un récit pour conserver, prolonger ces instants de plaisir. Que la montagne est belle ! Que nos Pyrénées sont belles en leurs diversités.

Philippe Le 12/11/2007

Publié dans Montagne

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